par Christian Paindavoine le 7 octobre 2009
Et bien voici un sujet qui fait couler beaucoup
d’encre dans la profession…
La question est très claire : peut-on faire autant confiance à un Maître d’œuvre qu’à un Constructeur en contrat de maisons individuelles (CMI) ?
Ma réponse est toute aussi claire : non !
Bien sûr, certains diront que je défends « ma propre paroisse »… Mais comment donc ! Je persiste et signe !
Tout d’abord comparons les 2 manières de travailler :
LE MAITRE D’ŒUVRE :
Il vous propose d’éditer vos plans, de vous mettre en relation avec des entreprises avec lesquelles vous signerez directement chacun des devis, et de surveiller votre chantier… Ses honoraires
seront basés sur ce travail. (Il est fréquent que bien que réprimé par la loi, certains Maîtres d’œuvres perçoivent en sus, des commissions de ces entreprises en leur facturant des frais de
métrés ou autres…)
Ce qu’il ne vous propose pas : il ne peut vous proposer de garantie de remboursement, ni de garantie de livraison, ni de garantie de prix et ni de garantie de délai ! Il ne vous propose pas non
plus de garantie de parfait-achèvement ni bien sûr le service d’un quelconque service après vente. Il ne propose en outre que très rarement de souscrire à l’assurance Dommage-Ouvrages…
LE CONSTRUCTEUR EN CONTRAT CMI :
Il reste votre seul interlocuteur pour tout puisqu’il vous propose un contrat de construction unique dans lequel il engage sa seule responsabilité car vous n’aurez pas à traiter les divers
marchés avec les entreprises. Votre construction est couverte par les garanties légales prises auprès d’un organisme bancaire ou d’assurances (garantie de remboursement, garantie de
livraison au prix et délai convenu, assurance Dommage-Ouvrages…)
Après la réception, votre maison est couverte par les garanties légales, décénales et biennales, ainsi que par l’assurance DO. De plus, chez Demeures du Nord, nous animons en interne un service
après-vente chargé de répondre en urgence à tous désordres mineurs afin de réduire les temps d’intervention.
A QUEL MOMENT LES CHOSES SE PASSENT-ELLES MAL ?
C’est toujours pareil ! Lorsqu’il y a des problèmes pendant ou après la construction, c’est à ce moment que l’on découvre les défauts ou qualités de l’un et de l’autre…
Imaginez que l’une des entreprises avec laquelle vous aurez traité directement l’un des marchés via un Maître d’ouvrages, vienne à mal réaliser son travail… Qui sera alors votre interlocuteur ?
Le Maître d’ouvrages qui n’a qu’une mission de surveillance ou l’entreprise en question ? Trop souvent, le client se sent abandonné par le Maître d’ouvrages qui lui rétorque qu’étant donné que le
marché a été passé directement entre vous et l’entreprise, c’est à vous d’agir auprès d’elle pour obtenir gain de cause. Pire encore lorsque cette entreprise vous réclame des frais
supplémentaires sur des travaux qui ont été mal rédigés, et bien sûr en cas de faillite de l’entreprise en question. Dans ce dernier cas, qui vous rembourse les frais déjà avancés ? On sait bien
aussi que retrouver une entreprise qui accepte de terminer le travail d’une entreprise défaillante est difficile et coûteux…
Dans le cas de dépassement de délai, qui paye les indemnités de retard ?
Dans le cas enfin de faillite du Maître d’ouvrages, qui va terminer votre chantier ? Qui va en faire respecter les prix, les délais et la qualité ? Personne puisque vous n’êtes pas protégés par
une garantie bancaire de bonne fin au prix et délai convenu. Vous serez obligés de payer à nouveau un autre professionnel, sans compter les tracas qui en
découleront…
LE MAITRE D’OEUVRE EN OPPOSITION AVEC LA LOI DE 1990
:
La loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990 (appelée plus communément « loi de 1990 ») et des textes pris pour son application précise principalement les points suivants :
Le Contrat de Construction de Maison Individuelle (CCMI) est obligatoire, à partir du moment où une personne fait construire :
un immeuble à usage d’habitation, ou à usage d’habitation et professionnel,
ne comportant pas plus de deux logements sur un terrain lui appartenant.
Le contrat de construction devra être couvert par les garanties et assurances suivantes :
La garantie de livraison à prix et délais convenus
La garantie de livraison couvre le maître de l’ouvrage, à compter de la date d’ouverture du chantier, contre les risques d’inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat, aux
prix et délais convenus. Cette garantie est OBLIGATOIRE et le constructeur doit fournir, au plus tard à la date d’ouverture du chantier, une attestation nominative établie par le garant qui sera
annexée au contrat. La garantie de livraison couvre aussi les pénalités forfaitaires applicables pour les retards de livraison de plus de trente jours.
L’assurance dommages-ouvrage
Elle doit être OBLIGATOIREMENT souscrite par le maître de l’ouvrage ou le constructeur pour le compte de celui-ci, avant la date d’ouverture du chantier. Elle prend effet à la réception et couvre
le paiement des réparations des désordres qui relèvent de la garantie décennale. Les désordres devront être déclarés par le maître d’œuvre à l’assureur par lettre recommandée avec accusé de
réception. Toutefois, elle garantit également le paiement des désordres survenus :
avant la réception, lorsque le contrat est résilié car l’entrepreneur n’a pas exécuté ses obligations ;
dans l’année qui suit la réception, lorsque l’entrepreneur n’a pas réparé les désordres relevant de la garantie décennale signalés lors de la réception.
La garantie de paiement des sous-traitants
Dans le cadre du CCMI, le constructeur de maisons individuelles a pour obligation de fournir à ses sous-traitants, sous peine de sanctions pénales, une garantie de paiement. Le constructeur doit
également adresser la copie des contrats de sous-traitance à l’établissement qui apporte la garantie de livraison prévue à l’article L. 231-6 du CCH.
En quoi un contrat passé avec un Maître d’œuvre est-il conforme avec cette loi qui a été justement votée pour protéger le consommateur ? J’ai d’ailleurs toujours été étonné que les pouvoirs
publics laissent encore aujourd’hui cette possibilité d’échapper à cette loi aux quelques Maîtres d’œuvre encore en activité…
On sait que ces derniers n’ont souvent que cette possibilité pour exercer la profession puisqu’il est impossible d’obtenir ces garanties obligatoires sans présenter une solidité financière
importante et sans pouvoir offrir de solides contre-garanties… Je sais aussi que c’est une manière de pratiquer cette profession en évitant les grosses responsabilités que celle-ci impose et
bien sûr d’économiser les frais importants générés par ces assurances obligatoires…
Je ne parle pas non plus de l’absence de garantie de parfait achèvement et d’un service après-vente chez le Maître d’oeuvre qui conduira le client à gérer lui-même les éventuels désordres
qui pourraient suivre la réception…
TERMINONS PAR UN CAS PRECIS ET ACTUEL !
J’ai eu connaissance de ce cas plutôt dramatique il y a environ une semaine :
Cela se déroule dans les Weppes. Nous devions démarrer une très belle maison dans un lotissement récent… Alors que nous implantons les piquets pour la délimiter, nous constatons avec stupeur
que la maison voisine sur la parcelle de gauche empiète de plus de 4,50m dans le terrain de notre client !
Cette maison mal implantée est en finition et devait être livrée pour la fin du mois d’octobre … Elle a été supervisée par un… Maître d’œuvre connu dans ce secteur !
Imaginons à présent les conséquences d’une telle erreur !
Notre client ne sait plus quoi faire… Le client du Maître d’œuvre (qui ne l’avait jamais averti jusqu’à ce jour) risque de devoir détruire sa maison et de reconstruire… J’estime le montant de
la destruction et reconstruction aux alentours de 400 000 euros…
Qui va payer ? Un Maître d’œuvre n’est pas assuré pour des erreurs d’implantation. Il va se retourner vers le maçon qui évidemment n’a pas les moyens de régler ce désordre et pour lequel en
général les assureurs ne couvrent pas les erreurs d’implantation… Je doute que ce maître d’œuvre en ait la possibilité aussi. Au cas où, la justice prouvera pourtant son entière
responsabilité car il était en charge de la conduite du chantier… Mais ce n’est pas pour autant qu’il aura les moyens de financer ces quelques 400 000 euros.
Aujourd’hui nous en sommes là : notre client qui ne peut démarrer sa construction, et le client du Maître d’œuvre qui est dans le désarroi le plus total risque de voir cette maison qu’il a
financée (et dont il a tant rêvé avec sa famille,) détruite sans peu d’espoir d’en obtenir le remboursement après s’être retourné contre ce Maître d’œuvre ! Ce dernier aura beau tenter de nier sa
responsabilité, le mal est fait !
De plus, cette erreur d’implantation a provoqué le fait que cette maison n’est plus conforme avec le permis de construire, qu’elle dépasse les zones de construction et que l’axe de faîtage
ne respecte plus le réglement: plus de possibilité donc d’obtenir un certificat de conformité de part la mairie et la DDE !!
Si ce client avait confié la réalisation de sa maison à un constructeur CMI, sans parler d’une telle erreur étonnante de la part d’un professionnel, il aurait pu au moins avoir la chance que ces
énormes frais soient pris en charge par la garantie de livraison…
CQFD !
PS : Mon propos n’est pas de mettre en garde les futurs acquéreurs contre les maîtres d’œuvres ! Chacun est libre de ses choix. Je souhaite surtout mettre en avant les qualités d’un contrat de
construction de maisons individuelles dont le règles ont été fixées en 1990 afin de protéger les clients par l’obligation pour le constructeur de souscrire à des assurances spécifiques qui les
protègent avant, pendant et après la construction !
C’est vrai, les assurances sont inutiles…quand il n’y a pas de problèmes !